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Taxe foncière : pourquoi a-t-elle fortement augmenté ces dix dernières années ?

23 septembre 2025 par
Taxe foncière : pourquoi a-t-elle fortement augmenté ces dix dernières années ?
Thibaut Lacorde

La taxe foncière est la taxe locale la plus importante en France. Elle concerne 33 millions de redevables – particuliers, entreprises et collectivités – et représente une ressource majeure pour les communes et intercommunalités. Elle s’applique à tous les biens immobiliers bâtis (résidences principales, secondaires, locaux commerciaux, entrepôts, usines, etc.) ainsi qu’aux propriétés non bâties.

Or, depuis dix ans, son poids n’a cessé de croître, parfois de manière spectaculaire, au point de susciter de vifs débats sur la soutenabilité de cet impôt et sur son rôle dans le financement des collectivités locales.

Une progression spectaculaire

Selon l’Observatoire des finances locales et les données consolidées de la DGFIP : 

  • Entre 2013 et 2023, la taxe foncière a augmenté en moyenne de +32,9% au niveau national.
  • À Paris, la hausse atteint +83% sur la même période, conséquence d’un double effet : revalorisation des bases et hausse marquée des taux, décidée par la municipalité.
  • En 2023, le produit total collecté a atteint 50,8 milliards d’euros, soit une progression de +9,7% par rapport à 2022.

Ces chiffres traduisent une tendance lourde : la taxe foncière est devenue un levier majeur pour compenser la baisse d’autres recettes fiscales locales.

Les raisons structurelles de la hausse

Trois grands facteurs expliquent cette progression :

La revalorisation automatique des bases cadastrales

La valeur locative cadastrale, assiette de calcul de la taxe foncière, est revalorisée chaque année en fonction d’un coefficient légal fixé en loi de finances. Ainsi par exemple : +3,4% en 2022, +7,1% en 2023 (niveau record en raison de l’inflation), +3,9% en 2024.

Les décisions des collectivités locales

Chaque commune et intercommunalité fixe librement ses taux dans le cadre prévu par le CGI (articles 1635 B sexies et suivants).

Certaines collectivités, confrontées à des besoins accrus de financement (investissements, inflation des dépenses de fonctionnement), ont choisi d’augmenter significativement leurs taux. 

Exemple marquant : la Ville de Paris a voté en 2023 une hausse de près de 52% de son taux de taxe foncière, portant son produit à 2,3 milliers d’euros.

La suppression progressive de la taxe d’habitation

La taxe foncière est devenue, avec la cotisation foncière des entreprises (CFE), la principale recette fiscale locale.

La disparition de la taxe d’habitation sur les résidences principales (loi de finances pour 2020) a privé les communes d’une ressource considérable. Pour compenser, l’État a transféré aux communes la part départementale de la taxe foncière… mais, dans les faits, de nombreuses collectivités ont utilisé le levier des taux pour maintenir leur équilibre budgétaire.

Les effets pour les contribuables : un poids de plus en plus lourd

Cette dynamique a plusieurs conséquences :

  • Pour les entreprises : la taxe foncière alourdit les charges d’exploitation, en particulier dans les zones urbaines et industrielles où les bases cadastrales sont élevées. Pour rappel, la taxe foncière s’ajoute déjà à la CFE, autre impôt local assis sur la valeur locative.
  • Pour les investisseurs immobiliers : une pression fiscale accrue qui peut réduire la rentabilité nette des opérations, notamment en immobilier locatif résidentiel.
  • Pour les ménages : un impôt difficilement compressible, à la différence de l’impôt sur le revenu qui dépend de la situation familiale. Certains propriétaires modestes se retrouvent en difficulté pour honorer cette charge annuelle.

Une question politique et économique

La hausse de la taxe foncière est régulièrement au coeur du débat public :

  • Les associations de propriétaires dénoncent une « explosion » qui fragilise l’accès à la propriété et pénalise l’investissement immobilier.
  • Les élus locaux défendent au contraire un outil indispensable pour financer les services publics locaux, alors que les dotations de l’État se réduisent.

Sur dix ans, la taxe foncière est devenue un impôt de plus en plus lourd, en raison notamment de l'indexation sur l’inflation, des décisions locales et de la réorganisation de la fiscalité locale après la suppression de la taxe d’habitation.

Dans ce contexte, il semble indispensable de contenir autant que faire se peut les hausses des bases et d'optimiser les taxations existantes...

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